vendredi 10 mai 2024

La Voie de la Vengeance

La Haute République met en avant le long et lent déclin des Jedi qui culminera avec la purge impulsée par Dark Sidious. 

Mais, bien avant, lors de la première phase de la Haute République, on avait déjà vu un affaiblissement notable des Jedi : ils n’ont pas réussi à cerner et battre les Nihil, ils ont été incapables de protéger la République des émergences ou de la destruction du Flambeau Stellaire. La perte d’influence des Jedi a commencé presque cent cinquante ans plus tôt. Les Jedi sont chassés, leur influence est remise en cause. L’idée qu’ils soient les seuls détenteurs de la vérité sur la Force est fortement combattue. On en a un exemple sur Jedha où « ils s’étaient retirés quand le mécontentement avait commencé à croitre parmi les autres cultes de la Force présents sur la lune des Pèlerins, et qui prétendaient que l’Ordre allait trop loin en se présentant comme la seule foi véritable ».  Ainsi, les Jedi ne semblent plus les bienvenus sur Jedha et toute leur symbolique ou leur puissance est réduite à néant. Ils ne bénéficient plus de respect (« il n’y avait pas de temple Jedi sur cette Lune, même si la présence d’une imposante statue de Chevalier dans le désert causait toujours la consternation (…) Le problème avait été réglé par les manifestants qui l’avaient abattue »).

Cependant, il faut préciser que Jedha a l’air d’un endroit particulièrement violent : « le sang des croyants les plus crédules arrosait les rues pavées de Jedha depuis des générations et cette source ne semblait pas près de se tarir ».

De plus, on retrouve encore les membres de la Voie de la main ouverte. Les membres, et en particulier leur leader appelé la mère, leur reprochaient de souiller la Force en l’utilisant. La mère résume ce qu’elle pense en disant que « plus les Jedi et leurs semblables usent de la Force, plus ils la dépouillent de son pouvoir et plus la dévastation s’étend ».


La Mère (Elecia Zeveron) est au centre du roman. On apprend ce qui la motive, on comprend sa radicalité. La Mère est prête à tout pour atteindre ses objectifs, même à sacrifier ceux qui l’ont aidé. Le Héraut en fait l’amère expérience : la Voie de la Main ouverte est pointée du doigt sur Jedha et la Mère décide de lui faire porter la responsabilité alors que ce n’est pas le cas. Pire, elle le pointe du doigt de façon publique, sur des canaux de communication ouverts : « Tu récoltes ce que tu as semé et toi seul devras répondre de tes crimes. Montre aux fidèles de Jedha… montre à la galaxie… qu’au fond de ton coeur, tu es toujours un homme bon, un bon père… »

Sur Jedha, au plus fort du chaos, la Mère est gravement blessée : sa carapace s’effrite. Ses proches commencent à comprendre qu’il y a quelque chose de bien secret en elle, peut-être quelque chose de honteux. On peut lire que « Yana fut frappée par l’apparence d’Elecia. Elle semblait avoir vieilli de vingt ans ». Consciente que son autorité s’effrite, la Mère utilise des artifices pour le conserver (« cette dernière était assise sur ce qui ressemblait de manière inquiétante à un trône »).


La Mère n’a pas façonné la Voie de la Main ouverte sans raison. Elle l’a fait pour se venger des Jedi. En effet, grâce à une Jedi appelée Oliviah, on suppose que la Mère peut avoir un lien avec un Jedi, qu’elle en a peut-être déjà croisé (« j’ai vu son visage à elle, même quand tout a basculé, et j’ai raison »). C’est Marda qui nous apprend la réalité : « ils ont emmené sa soeur et l’ont laissée sur place… parce qu’elle n’était pas assez douée ». Autrement dit, tout laisse croire que la Mère a fait tout ça parce qu’elle était aigrie, jalouse. D’ailleurs, on sent toute cette haine quand elle crache que « je n’aimais pas ma soeur. Elle ne représentait rien pour moi. Ils se sont trompés. Ils auraient dû m’emmener, moi ». La Mère ne souhaitait pas rendre à la Force une sorte de pureté, ses objectifs n’étaient pas désintéressés. Elle souhaitait mettre à bas les Jedi. 


La question amoureuse est également bien présente dans ce roman. C’est intéressant car elle est abordée du point de vue de groupes qui mettent en avant des interdit : les Jedi ont de gros problèmes avec l’attachement et les membres de la Main ouverte ne peuvent avoir de relation avec les Jedi. Marda Ro n’a pas oublié Kevmo Zink ; la Padawan a eu son lot d’aventures (« elle avait elle-même fricoté au fil des ans, parfois même sans se faire attraper »).

Le roman aborde aussi la question des amours morts, disparus : Marda a perdu Ro et sa cousine Yana a perdu Kor. Aucune des deux n’a réussi à tourner la page. Yana pense même que Kor lui parle, Yana Ro est bien souvent accompagnée par le souvenir de sa petite amie. Toutefois, Yana a conscience que ‘la chose qui hantait toutes ses heures de veille n’était pas Kor » et que « c’était le fruit de son imagination, la partie d’elle-même qui ne voulait pas la laisser partir ».


A la fin de la Voie de la duperie, les Jedi connaissaient la peur, en étant réduit à de la poussière par un égaliseur. Le Jedi Rell, choqué, précise que « on aurait … des enveloppes vides… la peau ressemblait à de la pierre ». S’ils sont capables de cette prouesse, cela est sans doute dû à leur origine, la planète d’où ils viennent (« la planète se répare toute seule (…) c’est la Force. Elle est si puissante ici. Si vivante »). 


En réalité, la Voie de la vengeance est la consécration de Marda Ro, sa prise de pouvoir. Elle redéfinit ce qui doit motiver la Voie, et opte pour un changement de méthodes. Dans un moment assez intense, très marquant, elle clame que « les Jedi sont venus chercher la Voie de la main ouverte, mais ils arrivent trop tard. Ce rêve est brisé. Ce rêve a échoué. Nous avons échoué. Cependant, ce temps est révolu (…) Ils n’ont pas écouté notre avertissement et ils vont à présent en payer le prix, un prix qui ne sera plus une mais ouverte mais un poing fermé ».

Marda est tellement prête à atteindre son but qu’elle fait du mal à sa soeur (« Yana sentit d’abord la douleur, avant même de voir l’éclat du sabre laser. Elle recula en titubant, incapable d’intégrer ce qui venait de se passer, les doigts serrés sur le moignon calciné qui avait été son poignet droit »). Mais, il est fort probable que Marda ait été influencée à ce moment par une suggestion d’Art de la Mère.

Finalement, quand Marda dit que « l’équilibre doit être rétabli. La Force doit être libre », on retrouve une certaine idée d’anarchie, de liberté totale prônée par les Nihil.


mardi 30 avril 2024

Lando Calrissian, à la recherche de sa fille

Le roman L’ombre des Sith nous parle de familles. Dathan tente de protéger Miramir et Rey de Palpatine alors que Lando Calrissian est à la recherche de sa fille disparue, Kadara. 


Lando n’a pas pu profiter longtemps de sa fille. Elle a été enlevée. Depuis, il la recherche partout, avec tous les moyens à sa disposition. Sa perte a causé un grand choc, une immense peine qui ne le quitte pas. D’ailleurs, Lando veut vivre cette peine (« il ne voulait pas que sa douleur s’estompe (…) Il voulait revivre cette expérience, ressentir son chagrin et sa souffrance avec une telle force qu’il se sente prêt à remuer l’univers entier juste pour retrouver son enfant, Kadara Calrissian »). C’est comme si c’était pour lui le moyen de ne pas l’oublier et de conserver l’énergie de la recherche.

Des années durant, Lando a recherché sa fille. Le résultat ? Un échec : « il avait cherché et il avait échoué. Cette quête l’avait mené d’un bout à l’autre de la galaxie, l’avait vu solliciter tous ses contacts, visiter toutes les lunes, toutes les stations et toutes les bases imaginables, mais il n’avait rien trouvé. ».


Dans un premier temps, Lando a pu compter sur ses amis, tous les liens créés dans ses activités d’homme d’affaires ou du temps de la Rébellion. Ses proches l’ont volontiers aidé. Mais, avec le temps, Lando a cessé de leur demander de l’aide, conscient qu’ils devaient mener leurs vies (« Luke devait se concentrer sur son temple, Han et Leia avaient leur propre vie. Lando ne leur en voulait pas. Au bout du compte, c’était à lui de supporter le problème -la douleur. Alors, Lando avait poursuivi ses recherches. Seul. »). C’est pour cela qu’on le retrouve dans un bar bien louche au début du roman. Ses oreilles traînent, il est toujours en quête du moindre indice. Il est forcément intéressé quand il entend les termes Sith et enlèvement dans la même phrase. Mais, il ne sait pas qu’il fait fausse route : ce ne sont pas des Sith qui ont enlevé sa fille mais le Premier Ordre, le fils bâtard de l’Empire qui n’a pas accepté sa défaite et veut se venger de ses principaux antagonistes.


Son périple le mène à croiser une famille en détresse : Dathan, Miramir et Rey. Il ne sait pas qui ils sont mais la situation le touche. Il trouve en eux un écho de sa propre existence (« il avait peut-être vieilli, avait peut-être perdu certaines de ses anciennes habitudes, mais il était toujours Lando Calrissian. Un héros de guerre décoré. Un général. Un père. »). Le souvenir de Kadara hante Lando, il ne veut pas que d’autres connaissent le même sort que lui. 

Luke, lui, est présent à ce moment de la vie de Lando. Ce dernier l’a prévenu qu’il a entendu parler des Sith. Il sait que c’est un sujet qui intéresse Luke. Le Jedi prend le temps d’observer son vieil ami. Il le sait plein de ressources, déterminé ; il le voit marqué. Il est clair que « Luke se faisait du souci pour lui. En dépit des apparences, de son charisme et de son assurance, Lando avait passé ces six dernières années dans un enfer intime. Son existence avait été bouleversée par l’enlèvement de sa fille. Et cela l’avait profondément changé »). Lando n’est donc plus le même. Il est toujours un joueur, un homme prêt à se lancer dans des opérations louches ou qui a des fréquentations qui sortent de l’ordinaire. Mais, il est en réalité un parent brisé.

jeudi 25 avril 2024

Qui est Shmi Skywalker ?

Les différents romans publiés ces dernières années nous en apprennent un peu plus sur Shmi Skywalker, un personnage peu traité mais important. C’est sa mort qui a fait basculer Anakin vers le côté obscur dans le film l’Attaque des Clones. 


Dans le Péril de la reine, on est plus tourné vers l’aspect d’esclave de la vie de Shmi. Sa vie ne lui appartient quasiment plus, elle est dépendante de la volonté d’un autre. Elle ne peut même pas protéger son fils contre les velléités de Watto, leur maître : « elle était impuissante. Elle ne pouvait ni protester ni manifester sa colère, ne pouvait ni marchander ni échanger. Elle n’avait rien à donner ». Cette affirmation dresse un tableau désespérant et négatif de Shmi. En réalité, dans son malheur d’esclave, Shmi a un talent comme le remarque Padmé. Il faut préciser que ce livre est orienté sur Padmé et nous offre parfois la vision de ses souvenirs. On peut ainsi lire que « en regardant les doigts habiles de Shmi assembler l’écran, chaque pièce se mettait en place si facilement que cela en paraissait presque magique ». Ce talent a ensuite été transmis à Anakin.


Dans l’Ombre de la reine, Padmé demande à Sabé, sa suivante, de rechercher Shmi. Padmé sait que Shmi est très importante pour Anakin. Elle se fait un devoir de dénoncer l’esclavage en général et de tirer Shmi de sa situation. Mais, Watto ne possède plus Shmi. Sabé ne trouve aucune trace de Shmi (« je sais que le ferrailleur l’a perdue. J’ignore s’il s’agissait d’un autre pari idiot ou s’il l’a vendue, mais elle n’est plus là. Je n’ai aucune idée de l’endroit où elle a pu aboutir »). Smhi a donc disparu comme un vulgaire objet perdu : cela illustre bien la condition d’une personne esclave. 


En réalité, on apprend dans l’Espoir de la Reine que Shmi a été affranchie et qu’elle a épousé un homme, Cliegg Lars. Ce n’était pas un mariage arrangé pour la tirer de l’emprise de l’esclavage mais un vrai mariage d’amour. Shmi a été accueillie et aimée par les Lars, et sa générosité leur a fait beaucoup de bien. Grâce à son attitude lors de la Menace fantôme où elle avait aidé Qui-Gon Jinn alors qu’elle n’avait pas grand-chose, on avait déjà un bel aperçu de la personne qu’était Shmi Skywalker : une personne altruiste, avec le coeur sur la main. Ce qu’on apprend le confirme : « il paraissait évident, dans la manière dont tous parlaient de Shmi, qu’elle n’avait pas été juste une pièce rapportée dans la famille Lars. Elle en avait été le centre ». Et la capture puis la disparition de Shmi a brisé ceux qui l’aimaient ; on apprend que « Cliegg était inconsolable » et « Owen furieux, même si sa rage n’égala en rien celle du fils de Shmi ».


Dans Comme des frères, Anakin a grandi en tant que Jedi, et il a dû apprendre à ne pas s’attacher. Ce n’est pas le fait de s’attacher qui pose problème, mais le fait de ne pas savoir lâcher prise si il le faut. Anakin n’a pas oublié sa mère, elle l’obsède toujours autant. Shmi Skywalker fait naître en lui tout un tas de sentiments qui le dépassent, qui le perturbent. On en a la preuve alors qu’il assiste à une cérémonie Jedi : « il revit l’expression de sa mère, les ride qui naissaient autour de son sourire, ses yeux qui ne jugeaient jamais (…) Soudain, le visage affectueux de Shmi Skywalker disparut de ses souvenirs, brusquement remplacé dans son esprit par le froid cinglant de la nuit. » Cela illustre bien l’impact de Shmi, sa mère, sur la vie d’Anakin. Elle a été une présence réconfortante et apaisante alors qu’ils étaient esclaves, et puis sa mort a fait naître en lui une immense douleur.


Dans le roman Ahsoka, on a le point de vue de Kenobi. Kenobi n’a pas réellement connu Shmi, n’a fait qu’entendre parler d’elle (« il s’était rendu sur la tombe de Shmi Skywalker pour s’excuser d’avoir perdu son fils. Il ne l’avait jamais rencontrée (…) Qui-Gon l’avait abandonnée ici, condamnée à son statut d’esclave, et Obi-Wan avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher le retour d’Anakin »). Autrement dit, les Jedi ont tout fait pour séparer Anakin de sa mère. Qui-Gon a laissé Shmi derrière lui sans aucun regard, sans aucun regret, conditionné qu’il était par son enseignement de Jedi. Et Kenobi s’est conformé à ça.