Tenebrous, Plagueis et Sidious ont mené les Sith à la consécration. Ils ont patiemment perpétué la Règle des deux, en faisant grandir l’Ordre Sith dans l’ombre. Dissimulés des Jedi et des forces républicaines, ils ont gagné en influence et en pouvoir, en investissant les champs économique et politique. Etre actif dans ces deux domaines leur a permis de côtoyer de près l’Ordre Jedi et d’avoir un avis critique sur cette organisation.
Dès les premières pages du roman, Plagueis présente clairement les objectifs des Sith. Bien qu’ils ne soient que deux, ils sont « comme un ouragan prêt à déclencher une tempête de destruction sur la République décrépite et l’Ordre Jedi assoupi ». Leurs ennemis sont clairement identifiés : ce ne sont pas que les Jedi mais aussi le système politique en place. Ce qui caractérise les Sith à cette époque, c’était leur relative humilité quitte à leur place : ils savent qu’ils sont voués à diriger la galaxie mais ils ont conscience de leurs limites, et surtout de la puissance des Jedi, notamment politique (« les Jedi occupaient une position de premier plan mais les Sith avaient tout le loisir d’étudier l’Ordre de loin, sans que les Jedi ne se rendent compte que des adversaires les menaçaient dans l’ombre »). L’ombre, c’est la doctrine Sith depuis Dark Bane. C’en est fini des troupes avec des dizaines de Sith qui défient la République, ils ne sont plus que deux, un maître et un apprenti.
Dominants, les Jedi le sont incontestablement. Ils ont l’oreille des Sénateurs et du Chancelier, et malgré tout ils n’exercent pas le pouvoir. C’est un fait qui n’échappe pas aux Sith. Ils en éprouvent presque du regret de voir des utilisateurs de la Force se limiter. C’est un peu ce qu’on ressent quand Palpatine dit à Plagueis qu’« il suffirait qu’ils utilisent la Force pour imposer leur volonté à toute la galaxie, s’ils le souhaitaient. J’aurais plus de respect pour eux s’ils le faisaient ». Plagueis est encore plus clair, plus explicite. Vivre si proche du centre du pouvoir les a affaiblis, leur a fait se réconforter dans de faux-semblants et les a empêchés de progresser : « la plupart des vies sont sans conséquences. Les Jedi ne l’ont pas compris. Ils sont tellement occupés à sauver des vies et à préserver l’équilibre des pouvoirs au sein de la Force qu’ils ont perdu de vue le fait que la vie intelligente doit évoluer sans cesse, qu’elle ne peut se contenter de languir dans un immobilisme parfait ». Sans doute croient ils que les Jedi aimeraient rester dans ce statu quo pour toujours, la République amenant l’ordre avec les Jedi pour guider et conseiller.
Si, dans son ensemble, l’Ordre Jedi est plus puissant que l’Ordre Sith, il n’en va pas de même des individus qui le composent. Plagueis a bien étudié l’histoire des deux organisations et il en a tiré une conclusion claire. Etre Sith nécessite beaucoup plus de courage et de volonté puisque « n’importe quel Sith peut maîtriser les arts Jedi, mais seul un Jedi sur mille pourrait jamais devenir un Sith car le Côté Obscur est réservé à ceux qui placent la prise en main de leur destin au-dessus de tout ce que l’existence peut offrir ». Peut-être que c’est la conséquence du fait que les Jedi sont trop jeunes (quelques mois) quand ils renoncent à leur famille et qu’il leur manque donc du coup la souffrance que ça représente de se séparer de tout, sans compter que ce n’est pas un choix de leur part mais qu’on leur impose.
Pour autant, Palpatine et Plagueis ne sont pas stupides au point de croire qu’ils élimineraient aisément les Jedi. Ces derniers sont nombreux et donc forts (« pour Palpatine, voir autant de Jedi en un seul endroit était à la fois enivrant et dégrisant. Même s’il était bien camouflé en citoyen ordinaire, il sentait leur fierté collective s’infiltrer en lui à travers la Force »). La dynamique est clairement du côté des Sith car les Jedi « sont capables de tirer l’énergie de le Force mais leur capacité à utiliser la Force a diminué ». C’est un peu comme si ils s’étaient reposés sur leurs lauriers, trop certains de leur situation. Ils ne se remettent pas en question, ils n’explorent pas la Force, ils ne cherchent pas à perturber l’ordre des choses. Plagueis affirme que « si les Jedi respectaient leur philosophie et agissaient véritablement en accord avec la force (…), ils passeraient du Côté Obscur ». Il méprise ces Jedi incapables de voir que le vent a tourné et que leur fin approche (« Yoda et les autres membres du Conseil doubleraient leurs séances de méditation pour tenter de scruter l’avenir, avec pour seul résultat de découvrir qu’il demeure confus et insondable »).
Finalement, c’est Dooku qui nous en apprendra le plus sur la déliquescence des Jedi. Ils « sont retranchés derrière des raisonnements archaïques et sont lents à adopter des changements (…) ils attendent l’avènement d’un rédempteur qui apportera l’équilibre à la Force et réinstaurera l’ordre ». C’est un sacré aveu d’échec : les Jedi, le groupe dominant, tremble littéralement et en est venu à attendre un miracle. C’est d’autant plus révélateur que c’est un ancien Jedi prometteur qui dit ça. D’une certaine façon, les Jedi se sont embourgeoisés.
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