Les Jedi sont sans doute aveuglés par la beauté de Coruscant. Pour ne rien arranger, ils vivent dans les couches supérieures de l’immense ville. Et bien qu’ils soient amenés à faire des missions dans toute la galaxie, ils ont du mal à en appréhender sa laideur. On en a un bel exemple avec la question de l’esclavage. Dans le roman Maître et apprenti, cette sorte d’aveuglement est parfaitement mise en avant par Obi-Wan Kenobi. Le jeune Jedi avoue en quelque sorte qu’il n’a jamais fait attention aux esclaves : « même si la pratique avait été abolie par la République, elle était encore très répandue dans l’ensemble de la galaxie (…) il n’en avait jamais vu équipé de plaque d’identification indiquant qu’ils appartenaient à une gigantesque entreprise… à moins qu’il ne l’ait tout simplement jamais remarqué ».
En réalité, l’esclavage illustre bien la limite des Jedi à qui une bonne partie de la résolution des crimes échappe. Ce n’est pas tant qu’ils ne s’intéressent pas à ça, c’est plus qu’ils n’en ont pas le droit, ils sont limités par un mandat, les missions qu’on leur donne et les lois et règles qui existent sur les planètes. Dans ce roman, Pax collabore avec les Jedi Qui-Gon Jinn et Kenobi ; l’homme est direct et franc. Il se moque de la naïveté de Kenobi qui n’a pas compris que certaines grandes entreprises étaient aussi puissantes, voire plus, que certains gouvernements (« si les ouvriers sont la propriété de l’entreprise au lieu d’être rémunérés, et bien, c’est une affaire interne à la Corporation, pas le problème des gouvernements des planètes où leurs possessions douées de raison sont envoyées travailler »).
Sur Pijal, même un homme comme Pax endurci à la laideur du monde est choqué par ce qu’il voit. Il a été grandement sensibilité par Rahara, sa coéquipière et ancienne esclave. Mais rien ne semble pouvoir le préparer à voir des enfants esclaves (« ce ne fut pas la nature du travail qui le frappa. Mais le fait que tous les ouvriers étaient des enfants »). Ceux qui naissent de parents esclaves sont automatiquement des esclaves. Il est très difficile de quitter les griffes des esclavagistes. Tout est fait pour maintenir les esclaves en captivité, pour qu’ils ne puissent pas être libres. La représentante de la Czerka, cette fameuse Corporation qui possède des esclaves, dit que « ceux qui se sont enfuis, plutôt que d’acheter légalement leur liberté ou de demander à quelqu’un de la racheter pour eux, ne sont pas d’anciens esclaves de la Czerka. Ils nous appartiennent toujours (…) toute planète qui fait affaire avec nous doit accepter d’opérer dans le respect de la charte ». On voit bien le côté impitoyable de cette entreprise qui se considère également l’égale des gouvernements.
Rahara a réussi à s’évader et à effacer la plaque d’identification. Elle a pu passer des années libre. En tout cas, c’est ce qu’elle croyait. Car, elle a été retrouvée, ne prenant pas en compte les changements de la Czerka. L’entreprise ne se contente plus de marquer ses propriétés, elle se sert dorénavant des visages des gens pour les marquer : « confirmé par reconnaissance faciale : propriété de la Czerka ». Dorénavant, « ils ont dans leurs dossiers des holos de tous les individus qu’ils ont possédés et ces informations remontent sur plusieurs générations ». Autrement dit, un esclave évadé vit toujours avec la peur d’être retrouvée. Et quand cela est fait, elle est à nouveau marquée. Rahara vit à nouveau cette triste expérience : « une tenaille miniature sortit d’un panneau pour lui retirer son gant gauche. Une aiguille s’enfonça dans le dos de sa main, transperçant la peau, et elle poussa un cri de douleur ». Rahara est toujours une esclave.
Le fait qu’il existe encore l’esclavage dérange. Rahara pose la question importante : « si la République n’est pas capable de faire quelque chose d’aussi honorable et fondamental que de s’attaquer à l’esclavage, alors à quoi sert-elle ? ». Qui-Gon Jinn a une réponse à cette question : il relative, trouve un faux-fuyant. Il dit que cela a toujours été comme ça et qu’on n’y peut rien : « certaines planètes avaient toujours fonctionné avec ce système de main d’oeuvre. Et l’interprétation même de l’esclavage variait en fonction des espèces ». Pire, il pense que les Jedi ne peuvent rien faire et que ce n’est pas de leur faute. Jinn suppose que les Jedi sont limités par les règles en place (« un Jedi en colère ne pouvait pas à lui seul mener une croisade galactique contre l’esclavage au-delà des frontières de la République ») et cela semble bien l’arranger.
Yoda fournit lui aussi son explication. On comprend qu’il a inféodé les Jedi à la République et que les Jedi opèrent selon les désirs de la République. Yoda assume clairement d’avoir limité les Jedi car il dit que « dans le cadre de nos mandats nous travaillons et le bien nous faisons du mieux que nous pouvons. Agir autrement, substituer notre jugement à celui de la République, serait répéter les erreurs du passé ». Yoda est encore traumatisé par des Jedi qui se sont crus plus capables, meilleurs et ont basculé vers l’obscurité. Yoda semble être terrorisé par un éventuel retour de l’obscurité.
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